Jung et l’inconscient : la voie vers le Soi profond

La notion d’inconscient est la découverte essentielle et capitale de la psychologie et de la psychanalyse. Le « moi conscient » n’est pas le seul maître dans la psyché, sa demeure. L’esprit ne gère pas à lui tout seul l’espace sur lequel il semble régner. Quelque chose d’impalpable en lui se dérobe et lui échappe, quelque chose sur laquelle il n’a aucune prise et dont il ignore jusqu’à l’existence. Cette zone sombre est une zone d’ombre appelée l’inconscient.

Sigmund Freud est le précurseur de cette découverte, les définitions diverses et changeantes apportées furent à plusieurs reprises, remaniées et les théories revisitées. Dès 1906, Freud, avec l’exploration de l’Œdipe, a jeté les bases et le fonctionnement de l’inconscient qu’il définit par une pléiade de pulsions angoissantes et exclusivement négatives qui s’affrontent avec la conscience.

Pour Jung, il s’agit également de pulsions négatives mais il perçoit, dans ce fonctionnement perturbant, une énergie de transformation et d’évolution générée pour faire progresser la personnalité. Il entrevoit ainsi une compensation possible là où Freud distingue la réalisation d’un désir.

La croissance de la personnalité se fait à partir de l'Inconscient.

L'approche novatrice de Jung

L’inconscient n’est pas un monstre démoniaque ; c’est un organisme naturel, indifférent du point de vue moral, esthétique et intellectuel, qui ne devient réellement dangereux que si notre attitude consciente à son égard est désespérément fausse. Plus nous refoulons en nous-mêmes, plus s’accusent les périls encourus du fait de l’inconscient.

C.G. Jung offre une explication révolutionnaire du concept de l’inconscient dans son ouvrage Archétypes de l’Inconscient Collectif publié en 1934. Il ouvre un espace plus large de cette notion en ajoutant une vision collective de l’inconscient, celle-ci se cantonnant dans une vision personnelle. Cette richesse primordiale, car il s’agit bien de cela, est complètement ignorée et inconnue de la conscience du « moi ». Cet espace primaire, primitif, archaïque et non élaboré ignore la contradiction et la notion du temps. Il se formule à l’état brut comme un matériau mal dégrossi difficilement gérable et « prêt à l’emploi ».

L’inconscient et ses contenus correspondent à l’ensemble dynamique des désirs, des tendances et des souvenirs refoulés, et tout ce qui pourrait être menaçant pour l’équilibre psychique. En effet, la tendance naturelle réside dans la fuite, le détournement ou l’aveuglement, autrement dit « le refoulement » repoussant de plus en plus loin et profondément dans les territoires de l’inconscient, ces ombres douloureuses.

Cette attitude est illusoire, il ne suffit pas d’enfoncer ou de cacher aux plus extrêmes limites tous ces contenus dérangeants pour qu’ils soient éliminés ou traités. Ces funestes ombres restent tapies dans les abysses les plus obscurs de la psyché, elles continuent subtilement mais sûrement d’opérer en exerçant leur travail d’influence. Elles surviendront dans la vie sous forme de rêves ou de cauchemars, elles s’immisceront dans le champ verbal sous forme de lapsus, ou encore en symptômes et somatisations corporelles allant jusqu’à la maladie mentale ou physique. Tous ces signes sont des indices qui suggèrent la présence de l’inconscient et son action invisible.

Freud nomme l’inconscient le « ça ». Ce « ça » méconnaît toutes les valeurs morales ou éducatives et se propage par le biais de l’énergie instinctive et pulsionnelle, la « libido » réduite dans son analyse à la sphère sexuelle ; quand Jung porte un regard plus consensuel et moins catégorique sur la question. La pensée de Freud est que la rencontre avec les contenus de l’inconscient s’avère culpabilisante, insistant sur des situations qui se trame dans la perversité, toujours à connotation sexuelle avec des liens incestueux.

L’analyse de Jung est plus holistique : pour lui, la psyché comporte 3 systèmes constitutifs, la conscience, l’inconscient personnel et l’inconscient collectif. C’est d’ailleurs ce positionnement qui provoquera la rupture entre Jung et son mentor Freud.

Les deux "Inconscient" de Jung

Selon Jung, l’inconscient s’exprime avec 2 polarités :

  • l’inconscient personnel, assez proche de la vision de Freud ;
  • l’inconscient collectif, une vision plus novatrice révélée par Jung.

Jung considère que l’inconscient intègre un processus qui doit absolument se faire entendre de la conscience. Cette manière de voir, qui sort des sentiers battus, fait de lui un véritable théoricien en la matière mais aussi un visionnaire quant à l’essor de la psychanalyse elle-même et de tous les potentiels d’ouverture qui en suivront.

Pour Jung, il est inconcevable d’attribuer au seul instinct sexuel la totalité du phénomène de l’inconscient. Car, l’Être humain détenteur de son histoire porte également, bien que gardée secrète et enfouie au plus profond, celle de l’humanité qui se manifeste à lui par une pléiade d’images et d’attitudes ancestrales.

Jung évoque aussi qu’au-delà des contenus inconscients personnels, comme une sorte d’ADN spirituel, l’Être absorbe l’inconscient de l’espèce humaine. Selon Jung, la tâche du « je » qui accède à une conscience de plus en plus grande, est d’affronter et d’accepter, non seulement l’inconscient qui est propre à chaque personne, mais également la situation et les caractéristiques collectifs qui sont celles dont l’a doté le hasard de la naissance.

Ainsi, dans l’inconscient collectif niche ce qui provient de la famille, des personnes de l’entourage immédiat, du pays d’origine, de la culture, de la race, de la religion et bien d’autres nuances.

L'Inconscient Collectif : un lien commun à toute l'humanité

Nous sommes d'un âge immense.

Ce concept empirique ne se limite pas à ses seuls contenus, puisqu’en fonction de leur position par rapport au « moi conscient », une relation de collaboration peut être envisagée. On observe donc, dans cette immensité, en plus de tous les éléments refoulés, tout ce qui s’apparente aux matériaux psychiques immatures qui, en évoluant, pourraient atteindre le seuil du conscient. Ainsi, la psyché étant une totalité consciente/inconsciente, il n’y a pas de contenu de la conscience qui ne soit inconscient à un autre point de vue et qui ne puisse redevenir inconscient.

Avant qu’il ne devienne individuel ou personnel, Jung suggère que l’inconscient soit un territoire plus vaste, illimité et qui s’étend à l’infini. L’inconscient collectif représente une strate beaucoup plus profonde que l’inconscient individuel, il permet à la personne de se relier à l’humanité. Il symbolise un espace inconnu et insondable d’où émerge une conscience collective. Grâce à l’identification de certains archétypes, l’inconscient personnel, qui a su se mettre en lien avec l’inconscient collectif, perçoit des informations que le « moi conscient » apporte à la conscience collective.

Ce concept d’inconscient collectif sous-entend un langage universel qui s’exprime par le biais d’archétypes et de symboles. Les archétypes, survivances primitives, créent et alimentent le sens en révélant une foule d’images héritées d’un monde ancestral.

L’ouverture au concept de l’inconscient collectif ouvre une autre forme de compréhension au regard des phénomènes collectifs, les facteurs socioculturels ne pouvant plus être évalués, ni considérés comme l’addition pure et simple d’inconscients individuels. Il apparaît comme un immense réservoir d’expérience commune à toute l’humanité qui appartient à tous et à chacun, il est accessible et disponible. Le langage utilisé est celui du symbole. La traduction n’est ni immédiate, ni rapide, ni évidente ; elle nécessite une observation de chacune des traces laissées par les rêves ou autres signes et synchronicités qui s’instillent et s’invitent dans nos existences.

L'Inconscient Personnel : le lien à nos racines

La Connaissance de la vie psychique consciente a sa clef dans la région de l'inconscient.

L’inconscient personnel est constitué par le substrat des souvenirs, des sentiments, des émotions et des comportements individuels oubliés ou refoulés de manière intentionnelle, il s’incorpore aux éléments conscients de la psyché et à la conscience elle-même.

Dans son concept de « l’ombre », Jung décrit tous ces éléments perturbants qui effleurent le conscient en ne limitant pas aux seuls instincts pulsionnels et sexuels. En effet, l’ombre se manifeste comme une instance pouvant investir tous les autres lieux psychiques comme la persona, l’anima et l’animus. Il insiste sur le fait que l’ombre symbolise la totalité de l’inconscient. Ces forces internes s’opposent entre elles et aux autres, et privilégient bien souvent l’espace onirique pour s’exprimer.

Jung est plus large dans sa définition de l’inconscient, qu’il attache également à l’esprit religieux de l’époque, à la pensée orientale, à la sagesse ancestrale et correspond à un savoir hérité du fond des âges. Il admet le concept freudien mais refuse de de le limiter et s’oppose à sa définition figée. Il consent à cet inconscient inférieur mais il lui adjoint un autre potentiel de richesse qui serait un réceptacle de sagesse au sens le plus ancien et le plus classique du terme.

Les trésors difficiles à trouver gisent dans l’océan de l’inconscient et que seuls les braves sont capables d’atteindre. Je pose comme hypothèse que le trésor est aussi le "compagnon" celui qui marche à nos côtés tout au long de la vie en toute probabilité, une comparaison très proche de l’ego solitaire qui trouve un compagnon en la personne du Soi, car au début le Soi est le non-ego inconnu. Tel est le thème du compagnon de voyage doué de pouvoirs magiques.

NAMASTE

Autrice de référence pour construire cet article :

Carole Sédillot, autrice, conférencière spécialisée en psychologie générale et jungienne.

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La karnatologie, c’est une histoire d’alliance : entre 3 outils, mais aussi entre 2 femmes. Mère, Léva – facilitatrice et développeuse de conscience – et fille, Justine – conteuse et poétesse –, nous avons entrelacé notre relation à des connaissances holistiques que nous avons étudiées et qui nous ont toutes deux guidées à un moment donné de notre chemin.